Fonds Vert pour le Climat. L’urgence d’un refinancement.
A l’approche de la session officielle de refinancement du Fonds Vert pour le Climat, tous les regards se tournent vers les pays donateurs - dont la Belgique - pour qu’ils augmentent leurs contributions respectives. Ce moment charnière est l’occasion de revenir sur cet instrument clé du mécanisme du financement climat international et son importance, particulièrement pour les pays en développement. On vous explique.
Pour comprendre le rôle et le cadre dans lequel s’inscrit le Fonds Vert pour le Climat, il faut retourner 10 ans en arrière, à la COP15 de Copenhague. C’est à cette occasion qu’un premier engagement chiffré pour le financement climat a été adopté : les pays développés se sont engagés à fournir au moins 100 milliards de dollars par an aux pays en développement à partir de 2020. Cette contribution doit être croissante, nouvelle et additionnelle. C’est également là que le Fonds Vert pour le Climat est né. Entériné l’année suivante, ce fonds doit devenir le principal canal multilatéral par lequel le financement climat international serait acheminé.
Le Fonds Vert pour le Climat : Présentation
Le Fonds Vert a tout d’abord connu une phase d’entrée en vigueur (avec notamment l’établissement d’un siège permanent en Corée du Sud, à partir de 2013) et ses premiers projets ont été approuvés fin 2015. Bien qu’il soit une entité opérationnelle du mécanisme financier de la Convention-Cadre des Nations Unies contre les changements climatiques (CCNUCC), inscrit dans les termes de l’Accord de Paris, il reste une institution juridiquement indépendante, hébergée par la Corée du Sud. Son conseil d’administration dispose d’une structure originale : il est composé de douze représentants de pays du Sud et douze de pays du Nord. C’est une particularité qui le démarque des institutions financières internationales comme la Banque mondiale ou le Fonds Monétaire International (FMI), dominées par les pays développés. La Belgique dispose d’un siège de suppléant au conseil d’administration, ce qui permet à notre pays de contribuer à une amélioration et une gestion efficace du Fonds.
Le Fonds Vert prévoit une série de garanties : les pays en développement peuvent, en principe, recevoir un financement direct du Fonds et ce dernier doit assurer un équilibre entre les projets d’atténuation du réchauffement et les projets d’adaptation aux dérèglements climatiques. Il répond également aux besoins urgents des pays les moins avancés (PMA), des petits États insulaires en développement (PEID), des pays africains et des acteurs du secteur privé local.
Si le Fonds souffre encore d’une série de maladies de jeunesse (notamment au niveau de la gouvernance et de la lourdeur de ses procédures), il doit être reconnu comme un instrument important. Cela implique pour les pays donateurs d’envoyer un signal positif en décidant de mobiliser des contributions suffisantes.
Le refinancement du Fonds Vert : une étape indispensable pour son bon fonctionnement
Au cours de la première période de financement du Fonds (2015-2018), un montant total de 10,2 milliards de dollars avait été annoncé. 5,2 milliards ont été dépensés dans des projets climatiques et 2,4 milliards doivent encore être distribués en soutien à des projets [1]. Parallèlement, il est prévu que le Fonds soit réapprovisionné lorsque 60 % de ses actifs sont engagés. C’est pour cette raison que le processus de refinancement a été entamé en octobre 2018 et aboutira lors d’une session officielle d’annonces de contributions, les 24 et 25 octobre prochains, à Paris.
Or, pour permettre à ce Fonds de fonctionner efficacement et de financer des projets climatiques pour les pays en développement, les pays donateurs doivent s’engager de manière concrète à doubler leurs contributions respectives. Plusieurs pays ont déjà montré la voie, annonçant un doublement de leur contribution précédente : l’Allemagne et la Norvège lors de la COP24, le Royaume-Uni et la France lors du G7 et la Suède et le Luxembourg lors du Sommet d’Action sur le Climat du 23 septembre dernier. La Belgique ne fait pas exception et doit également annoncer un doublement de sa contribution, ce qui équivaut au montant de minimum 160 millions d’euros pour l’ensemble des entités belges, fédéral et Régions.
Qu’attendent les organisations de la société civile ?
Cette session est une occasion importante pour la Belgique de rejoindre les pays les plus ambitieux et d’envoyer un signal fort en termes de solidarité internationale. Un premier signe encourageant a été donné par notre Premier Ministre lors du sommet d’Action pour le Climat du 23 septembre dernier. En effet, lors de sa prise de parole à la tribune des Nations Unies, il a annoncé vouloir doubler la contribution belge au Fonds Vert, décision qui devrait être « prise conjointement avec le Parlement ». Pour joindre le geste à la parole, un doublement de la contribution fédérale devrait être annoncé à Paris, fin octobre. Ce qui reviendrait donc à annoncer la somme de 120 millions d’euros pour le niveau fédéral [2]. Les Régions doivent suivre cette voie et s’engager elles aussi à doubler leurs contributions respectives [3].
En effet, sans un financement suffisant pour les pays en développement, il ne peut y avoir de réponse juste à la crise climatique. En tant que pollueur historique, la Belgique a une responsabilité à assumer vis-à-vis des pays vulnérables. Répondre à l’urgence climatique nécessite en outre une transition planétaire vers des modes de production et de consommation soutenables. Il est donc dans l’intérêt des pays développés de s’assurer que les pays en développement ont les moyens nécessaires pour opérer une telle transition.
La Coalition Climat a lancé un décompte de 100 jours aux élus belges pour qu’ils prennent des actions concrètes pour accélérer l’ambition climatique de la Belgique d’ici à la fin de l’année. Le doublement de la contribution belge au Fonds Vert pour le Climat fait partie de ses priorités.
UPDATE 26/10 : La Belgique a annoncé une maigre contribution de 40 millions € ce vendredi 25 octobre lors de la session officielle de refinancement du Fonds Vert à Paris. C’est une occasion manquée, alors que le Parlement fédéral a adopté une résolution en temps et en heure pour donner un mandat officiel au gouvernement pour qu’il double sa contribution au Fonds Vert. Non seulement le gouvernement a ignoré la résolution parlementaire et n’a pas doublé sa contribution, mais en plus le montant annoncé est inférieur à la contribution précédente de 50 millions d’euros. Nous dénonçons cette frilosité du gouvernement et demandons que la contribution fédérale, ainsi que celles des Régions, soient rehaussées pour atteindre un doublement au plus tard lors de la COP 25. La Belgique doit s’engager de manière juste et équitable pour plus de justice climatique.
[1] Pour plus de détails, voir : https://www.greenclimate.....
[2] Cette demande s’explique simplement : A Lima, en 2014 (COP 20), le fédéral a annoncé, par la voix d’Alexander De Croo, que sa contribution au FVC s’élèverait à 50 millions € (ou 66,9 millions USD). Doubler ce montant (66,9 x2) et le convertir avec le taux actuel de conversion du FVC nous ramène au montant minimum de 120 millions d’euros.
[3] Voir aussi notre réaction : https://www.cncd.be/Finan...